Films kanak de Gilles Dagneau : comprendre ce qui se joue en Nouvelle-Calédonie
Depuis janvier 2025, BED essaie de rassembler plus de films sur les Kanak, afin d'offrir de cette culture, de ce peuple, une autre vision que celle rapportée lors des affrontements du printemps 2024. Repousser loin le mépris affiché pour ce peuple, dans un temps où les esprits, au lieu de se décoloniser, naviguent crânement vers le repli, les provocations, les offenses.
Aussi vous proposons-nous le film de Gilles Dagneau, Renzo Piano, le chemin kanak, qui revient sur la construction du Centre culturel Jean-Marie Tjibaou, inauguré en 1998. Jean-Marie Tjibaou, grand leader indépendantiste kanak, a été assassiné en mai 1989. Dès 1990, sous l'égide de l'Etat français, et suivi par l'Agence de Développement de la culture Kanak, des études étaient lancées pour un bâtiment emblématique de la culture kanak, qui puisse être un écrin aux collections d'objets traditionnels, mais aussi un centre pédagogique et touristique.
C'est un retour sur le travail de l'architecte gênois Renzo Piano ( connu pour ses bâtiments du Centre Pompidou à Paris, du Whitney Museum of American Art à New-York). Un homme fier de ses racines, à l'écoute d'une culture qui lui était lointaine, mais qu'il saura véritablement entendre.
Il aura su surtout bien s'entourer, notamment avec Alban Bensa, anthropologue français spécialiste de la Nouvelle-Calédonie. Ce dernier a mis toute son intelligence de chercheur dans des tentatives de dépoussiérer l'ethnologie, de déconstruire les mythes hérités de Levi-Strauss, et de repousser au loin l'image exotique et dévalorisante du bon sauvage. Il reste depuis sa disparition en 2021 l'un des plus fins connaisseurs de la culture kanak. On retient de lui, parmi beaucoup d'autres, les ouvrages La Fin de l’exotisme et Le sanglot de l'aigle-pêcheur (tous deux aux éditions Anacharsis).
Aux paroles du chercheur répondent les paroles pleines de bon sens des femmes kanak sollicitées lors de la construction, avec parmi elles, la parole affûtée de Marie-Claude Tjibaou, veuve du leader assassiné. Michel Rocard apparaît également comme témoin et garant de cette ambitieuse entreprise, et l'on pourra mesurer combien le protocole de décolonisation alors à l'œuvre a été sauvagement attaqué et méprisé par la suite.
Nous sommes reconnaissants à Gilles Dagneau de nous le rappeler habilement, dans la trame de ses films, axés sur des moments historiques de la Nouvelle-Calédonie, versant Kanaky.
Nous vous proposons des extraits de Jean-Marie Tjibaou, la parole assassinée (1998), Tjibaou, le pardon (2006), Le gendarme Citron (2008) ...
